samedi 4 juin 2022

Le miracle n'aura pas lieu

et le miracle, cest qu'il n'ait pas lieu.


MetaBlog: La sainte Eglise catholique (ab2t.blogspot.com)


Cette belle méditation (car tout commentaire du credo ne saurait en être qu'une méditation) montre que tout ce qu'énonce le Symbole des apôtres après l'affirmation de la foi dans les trois personnes divines (la vie spirituelle est un prolongement de la vie trinitaire) est une apposition du rôle de l'Esprit Saint dans la création continue comme une action de Celui-ci, et l'Eglise catholique est la première de ses appositions. Au bout de la chaîne de ces appositions, il y a la rémission des péchés, qui rend possible la résurrection de la chair, c'est-à-dire le fait pour la chair criminelle de mettre un pied devant l'autre sans se regarder dans la glace et subir le supplice du miroir, et la vie éternelle, où l'Esprit qui planait sur les eaux réconcilie notre chair criminelle, christifiée par le Verbe qui vient y semer une parole, pour la réussite de la convocation divine adressée au premier Adam.


"L'Eglise est antérieure au Christ" comme "le bercail" précède le troupeau: cette audace métaphysique de l'auteur rappelle celle où, dans son livre "Délivrés", il montrait que le chrétien a la liberté d'aller et de venir,  d'"entrer et de sortir du Christ". Le bercail précède le troupeau au terme de "l'Evangile éternel" qui fait que nous rêvons tous de ne pas avoir le même chemin ("J'ai encore d'autres brebis qui ne sont pas de cette bergerie"), mais d'avoir le même port. Port d'attache où l'"unité" soit possible sans qu'unité rime avec uniformité, sans que l'individu se perde dans le collectif et son "esprit d'équipe", sans que la collectivité dégénère en collectivisme. Nous rêvons de faire corps sans parvenir à soulever la chape de plomb d'une solitude dans laquelle, disent les pessimistes, l'homme naît, grandit et meurt seul. Or les deux vérités se concilient: l'homme est seul et il n'existe que de former un corps avec les autres hommes, sous la motion de l'Esprit, "l'âme incréée de l'Eglise", pour donner corps à la Parole du Christ qui a animé la chair.


L'Evangile a annoncé le Royaume et c'est l'Eglise qui est venue. "Tant d'hommes entre Dieu et moi" depuis que "l'unique Médiateur" est descendu dans la chair. Comment l'Eglise peu-elle être "la seule internationale qui tienne", comme aime à le répéter notre auteur dans un trait qu'il affectionne? L'Eglise est la seule internationale qui tienne parce qu'elle concentre le plus d'hommerie. La sainteté qui en émane n'est pas une sainteté caractérielle, mais elle rayonne de la sainteté de Dieu,  le seul Saint.


"Ce ne sont pas les bienportants qui ont besoin du médecin, mais les malades" pour qu'"il y (ait) plus de joie au ciel pour un seul pécheur qui se convertit que pour 99 justes qui n'ont pas besoin de conversion." C'est pourquoi Jésus s'est fait "homme à l'exception du péché" (nous ne sommes pas à un oxymore près), mais Il s'est fait surtout médecin, un médecin à qui ses malades lancent: "Médecin, guéris-toi toi-même", comme on fait procès aux professeurs de bonheur de n'être pas heureux en leur disant avec Aragon, non pas que "la femme est l'avenir de l'homme", mais que "qui parle de bonheur a souvent les yeux tristes". 


Françoise Dolto estimait que le coup de génie du "Christ thérapeute" comme aurait parlé Maurice Bellet était de  demander  à son malade ce qu'il voulait que le médecin fasse pour lui, ou encore: "veux-tu guérir?" Si le malade répond honnêtement, il avouera que non. "Veux-tu vraiment ce que tu désires?", demandait Jacques Lacan à ses patients. Toute thérapie se heurte à la buttée du vouloir : le malade ne veut pas guérir alors qu'il demande la guérison à son médecin qui lui promet de commencer par ne pas lui nuire: "Primum non nocere".  


Rien n'est plus mystérieux que la volonté. De quel droit dit-on "je veux"? Comment veut-on? Pourquoi ne veut-on pas? La volonté est un muscle, c'est-à-dire qu'elle s'entraîne, on s'entraîne à vouloir, vouloir comme aimer est un effet d'entraînement, vive les entraîneurs et les entraîneuses! Mais la volonté ne veut pas comme l'amour n'est pas aimé, pourquoi? Et pourquoi ne parle-t-on que de la volonté de Dieu, comme si celle-ci précédait la liberté qu'Il nous donne, comme si Dieu n'était que Volonté comme il est censé n'être qu'amour? 


La volonté ne veut pas, parce que le malade a besoin du médecin, mais le médecin n'a pas besoin et n'a pas promis que le malade guérirait.  Le médecin est le premier des incurables: il ne peut pas plus se guérir lui-même que se sauver lui-même ou descendre de la croix. Il n'est pas venu pour faire des miracles, sauf à titre exceptionnel, pour confirmer la règle de la maladie de l'homme, tant qu'il n'est pas sauvé. Il est venu accompagner le malade et là est le miracle permanent, qui réalise l'unité de l'homme en échec, qui soudain réussit, à répondre à l'appel de Dieu, réussit à renaître. C'est entre autres ce que nous montre cet article. 

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