Pour les Grecs, sur la mythologie desquels freud a
fait son lit, moins pour coucher avec sa mère que pour transmuer le péché
originel en « dette collective » dans le déshonneur des parents, et
le fratricide en un cannibale parricide de la « horde primitive » en
un « repas totémique » qui devait précéder l’émergence de la famille
nucléaire avant la ficion de l’atome, pour les Grecs et en particulier pour
Sophocle, Jocaste a voulu empêcher Œdipe de chercher à savoir s’il couchait
avec sa mère parce qu’elle aimait l’amour qu’ils faisaient ensemble et voulait
continuer à l’avoir pour amant.
Pour les « écrivains sacrés » de la Bible
hébraïque, alors qu’Eve est crée du côté d’adam qui, du fait de ce
bilatéralisme psychique et de la gratuité de l’aide qui lui est apportée
presque sans qu’il ait rien demandé, s’écrie : « C’est la chair de ma
chair ! » en s’émerveillant de la complémentarité d’un être
créélatéralement, Eve ne donne pas plus tôt naissance à Caïn qu’elle
l’accueille par ces mots : « J’ai acquis un homme ».
L’homme n’aidera pas beaucoup la femme qu’il aura
sollicitée comme une aide, et la femme que l’homme veut garder donnera tout à
l’enfant qu’elle aura acquis comme un prolongement de soi-même, dans un
spontanéisme narcissique (le narcissisme est le paradis de ‘linnocence de
l’âme) qui, s’il dénotait une immaturité psychique qu’il s’agissait de dépasser
aux dires du père de la psychanalyse, le fascinait, raconte René Girard, quand il le rencontrait chez des femmes
naïvement et totalement adonnées à elles-mêmes.
Le narcissisme adonné à lui-même de la femme
latérale à qui son mari ne donne rien s’abandonne dans la mère à l’enfant qui
la prolonge. La générosité prolonge l’acquisition, mais se prolonge en
possessivité de la mère abusive, en phase terminale du narcissisme maternel. A
l’inverse, la latéralité d’où lui est crée la femme en gage de gratuité se
prolonge certes dans la galanterie des relations courtoises, mais ne va pas
jusqu’à ce que l’homme se dépense en aide ménagère à sa femme qu’il soutiendrait
dans l’émancipation de ses tâches et sa double journée.
Pour ma part, c’est de ma mère, via Mme W., que j’ai
appris la générosité. Mais c’est de mon père que j’ai appris le goût de la
liberté, sinon la libéralité. Quand j’ai compris ce qu’était la générosité, je
n’ai pas douté que c’était la plus grande des qualités morales. Mais la liberté
élargit de la loi d’où émerge la morale et qu’est censée indiquer le père dans
le système du grand Sigmund qui a mangé le sien. La liberté élargit de la loi d’où
naît la morale avec la générosité qui brille à son sommet, mais la générosité
n’est pas une oblation latérale à un être qui ne nous est de rien. La
générosité est un investissement sur soi-même à travers le donataire principal
qu’est l’enfant au sein nourri par la pieta.
La sucion vorace de l’enfant n’est pas une façon de
profiter sans vergogne du lait qu’il tire de sa mère en qui ce lait est monté
pour lui : l’enfant retire de sa mère le sentiment de propriété et
l’appropriation qu’elle a fait de lui comme un prolongement d’elle-même.
L’enfant se tire de cette appropriation en tirant le lait de sa mère. Il se
prépare à la décevoir après l’avoir investie pour commencer de s’appartenir en
cessant d’être un retour sur investissement à qui l’on donne sans compter
pourvu que ce soit toujours à soi qu’on donne, au fruit de ses entrailles ou à
son bâton de vieillesse, comme je me suis entendu dire par ma mère que je
l’étais pour elle.
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